22.3.10

Prince = Guy Debord

Mercredi 7 octobre 2009, subjugué par le lieu, Prince décide, en plein défilé Chanel, d'organiser, pour le dimanche qui suit, deux concerts au Grand Palais. Le 11 octobre donc, le public dans la file d'attente est informé par tous les moyens possible (affiches, annonces micro, message individuel à la billetterie) qu'il est interdit de filmer ou photographier dans l'enceinte du Grand Palais sous peine de se voir expulser illico-presto. 21h, le concert débute. Pas un Iphone levé. Le public s'oublie et profite pleinement de l'instant. Tous les désormais traditionnels crétins décérébrés soucieux de faire fonctionner l'option caméra/photo de leur récente acquisition dansent et tapent des mains (délicat avec un appareil photo). Le lendemain aucune vidéo sur youtube (de toutes manières Prince se paye une équipe d'avocats qui se charge de faire évacuer dans l'heure qui suit sa mise en ligne tout contenu non légal). Une bonne part des abrutis susnommés se plaindront que Prince est un maniaque obsessionnel de son image. Celui-ci leur retournera gentiment (pour toujours plus de plaisir, nous nous sommes permis ici de transposer des propos que Prince n'a jamais tenu en langage PROT) : "et vous bande d'ahuris à vouloir filmer à tout prix et mettre en ligne de façon compulsive de tremblantes vidéos dégueulasses de pixels dont je n'évoquerai même pas ici la calamiteuse qualité sonore, vous ne seriez pas des maniaques de l'image peut-être ? "

mmmh... elles vont être belles vos photos !

Bref ce concert fut le premier depuis longtemps où aucun spectateur n'eut l'idée de mettre une distance vis à vis de l'évènement (mais comment peut on dire "c'est trop bon" en tentant à bout de bras de cadrer une photo dans la cohue caractéristique d'un concert ??). Ainsi cet évènement a échappé à toute mise en spectacle. Toute marchandisation a été annihilée au profit d'un concert unique et d'une bonne part d'improvisation tant dans la musique que dans l'organisation.
En sortant du concert le spectateur ravi peut substituer au traditionnel "j'y étais !" le nettement plus PROT : "j'ai vécu !".

21.3.10

Temps PROT



En toute logique, on fête son anniversaire une seule fois par an. Le jour de sa naissance. Ou plutôt dirait Galilée, chaque jour que l’univers fait où la terre sillonne à nouveau le lieu de l’espace du jour où vous êtes né.

Bien différente est la pensée PROT. La pensée PROT ne sillonne pas l’espace, elle le féconde. Ensuite elle fait sienne une idée du temps bien singulière par laquelle l’aPROTe PROT calcule son temps en jours et en heure. Car le temps PROT est un kamikaze pour lequel le tic-tac du détonateur est une douce mélodie ; il n’est pas le vieux four mal entretenu et moucheté d'huile par lequel votre voisine fasciste et septuagénaire s'intoxique chaque jour un peu plus en cuisinant ; il est paire de fesses galbée, assise sur un canapé par un dimanche après midi, bolide élancé dans la nuit entre les trottoirs engraissés de bière.
Le nouvel humaniste PROT ne dira pas qu’il a 30 ans par exemple, mais bien plutôt qu’il est tout excité de vivre son 10957,5 ème jour de gloire dans l’univers chaque jour fécondé par la glorieuse pensée PROT. Loin de la logique numérique des supercalculateurs de la pensée moderne, il s’agit d’un raisonnement conduit pas l’excitation et l’émotion des forces primitives et telluriques. Pensez qu’un nourrisson qui découvre la vie avec ses premiers émois n’irait jamais dire « j’ai ‘moins 350 jours d’ici mes un an’ » quand il est né depuis 15 jours ; il dirait tout simplement : « j’ai 15 jours ». Que l’idiot en déduise que le PROTologue serait sur la même longueur d’onde que le nourrisson il n’y aurait qu’un pas ; mais les calculateurs de la pensée moderne ne sont ils pas des horlogistes à la petite semaine dont le travail est d’endormir les masses derrière des chiffres abscond voués à leur faire oublier qu’un jour est un jour, une heure est une heure ? Car dire j’ai 30 ans, c’est un peu comme répondre à votre maraîcher, lorsqu’il vous demande combien vous voulez de radis dans une botte : « mettez m’en une trentaine » ; l’aPROTe PROT dira plutôt : « mettez m’en dix mille neuf cent cinquante sept s’il vous plait ».

12.3.10

exotisme PROT (bis)

1967, les Stones, en plein trip d'acide, accouchent d'un album psychédélico-prétentieux : Their Satanic Majesties request. Cette tentative de Sgt Pepperisation de leur musique est rude : l' album en question est tout naze.
Cela dit, il a 2 mérites:
- Dans le genre désaccordé, mou, expérimental, prétentieux et sans intérêt il enterre largement le Velvet Underground avant même qu'il ait eu l'idée d'exister.
- Il va nous permettre d'approfondir cette question de l'exotisme qui nous tarabuste.
En effet, au milieu de cet album indigeste et mal foutu un morceau enfonce définitivement le clou : Gomper, à moins que ce ne soit Sing this all together.
Probablement dépassés par l'état de dégradation avancé de Brian Jones et ne sachant quoi en faire, Jagger-Richard décident de réunir tout ce qu'ils peuvent trouver d'instruments exotiques: Tablas, cithar, flute de Joujouka, Oud, et enferment le soi-disant "génie de la musique" dans le studio pendant une nuit. Le résultat est atterrant. Tandis qu'un joueur de tablas voue sa vie à tenter de saisir 10% de la musicalité de son instrument, Brian, tout au long de cette nuit, alterne allégrement d'un instrument à l'autre, pensant certainement que son statut d'occidental sous psychotropes lui permet d'en saisir l'essence et d'accélérer son apprentissage. Au final donc, comme on peut s'y attendre: c'est joué n'importe comment.
Que Brian Jones s'amuse avec des instruments dont il ne tente même pas de piger l'usage c'est une chose. Qu'il décide de s'enregistrer et que Jagger Richard soient suffisamment défoncés pour tolérer que ce soit sur le disque en est une autre. Pardonnons leur et mettons sur le compte de la jeunesse et de la défonce ce comportement franchement limite.
Et remémorons nous cet exemple qui au final à le mérite d'être bien drôle et d'avoir été commis par le plus grand groupe de rock de tous les temps, pour ne pas tomber dans les mêmes travers à l'avenir.

5.3.10

Radio PROT : Giclée

En se focalisant sur un détail rythmique, une fioriture accidentelle, ou une subtilité harmonique, radio PROT vous invite à une séance d’écoute trans-géographique de sa discothèque.
Chaque émission est conçue comme une promenade radiophonique orientée autour d’une notion à priori non-musicale : giclée, broderie, hypnose, pouss'au cul, voltige….

Enfilez-vous sans plus attendre le premier épisode : "Giclée"

1.3.10

Les Stones, les maracas et le post-modernisme

L’usage des maracas, très répandu dans la musique latine et antillaise (pas moyen de faire un bon groupe de salsa sans maracas), apparait également comme un élément rythmique essentiel de tout un tas de productions dites « rock ». En effet, bien que l’on trouve rarement un joueur de maracas au sein d’un groupe du style sus-nommé, cet idiophone rythmique figure en bonne place dans les productions studio. Il suffit de se replonger dans la discographie des Stones pour le constater. Si, dans les concerts des années soixante, Mick se plaît à tenir le rôle du « joueur de maracas », il faut bien reconnaître que l’usage qu’il en fait est plus scénique qu’acoustique : on les voit, mais on les entend peu. En album cependant, ces dernières occupent une place considérable. Jouées par Phil Spector dans le premier album, tenues par on-ne-sait-trop-qui en redescente de trip dans Satanic Majesties : les maracas sont un élément essentiel du cocktail stonien.
Mais, c’est avec le single qui marque leur réveil post-psychédélique : Jumpin’ Jack Flash, que les Stones vont ré-inventer l’usage des maracas et en faire un Gimmick indentifiable.
Plutôt que de noyer le « Tchik Tchik » dans la rythmique générale du morceau, il est projeté en avant du mix après le 2° refrain. L’effet est saisissant : les maracas viennent crépiter dans nos oreilles et insufflent au dernier couplet (2 fois plus long que les 2 précédents) un groove qui nous propulse dans des sphères post-psychotropiques alors insoupçonnées chez les Stones (surtout par Brian, qui loupera le coche).
Ré-écoutez, ça vaut le coup.
Ce malin subterfuge de production ré-apparaît de manière au moins aussi réussie dans le ravageur Brown Sugar. Les maracas surgissent au 3° couplet lui donnant une pulsation rythmique inouïe. Ajoutez à ceci les chœurs éthylico-éraillés d’un Keith Richard sous-mixé : c’est imparable. Retournez-y une oreille, ça vaut son pesant de graine de pavot. Profitez en pour apprécier au passage la présence, tout au long du morceau, d’une guitare acoustique noyée dans le mix. Le micro placé à proximité des cordes lors de l’enregistrement a permis de saisir au plus près le grattement du médiator. Cette subtilité de production confère à cette guitare un rôle de maracas subliminales essentielles à la dynamique rythmique de ce tube.
Fin des années 60, début des années 70, la société post-moderne et les Stones s’inventent : alors que l’open Tuning devient la marque de fabrique des riff Richardien, Mick affirme l’autonomie de son groupe en fondant le label « Rolling Stones records », et les maracas surgissent après le 2° couplet de leur tubes « rock »…